La concentration du secteur annoncée comme inéluctable en Suisse ne s’est toujours pas réalisée


A l’heure où les marchés financiers sont malmenés, où les conditions-cadres sont en perpétuelle évolution et où, conséquence des précitées, le processus de consolidation se poursuit dans le monde bancaire, comment se porte le secteur de la gestion de fortune indépendante dans notre pays?
Il y a quelques années, certains experts prédisaient que le domaine des sociétés de gestion de fortune hors du périmètre bancaire allait inexorablement se concentrer et le nombre de ses acteurs drastiquement diminuer. Les prédictions les plus pessimistes tablaient même sur une diminution de moitié des protagonistes à l’horizon 2010.

Les raisons avancées pour une telle consolidation du secteur étaient alors la charge toujours grandissante de l’administration, le poids sans cesse croissant de la compliance, la diminution des marges, la complexité accrue des règlementations à observer et l’impact de celles-ci sur les politiques d’investissement. Tout ceci couronné par le constat d’un niveau relativement élevé d’impréparation à l’inévitable processus de succession au sein des sociétés de gestion. Il était ainsi exposé que seules les entreprises d’une certaine taille pourraient survivre et qu’une forte concentration était incontournable dans un milieu où les très petites structures (1 à 3 personnes) sont extrêmement nombreuses (environ 50% des entités, soit quelque 1500 sociétés sur 3000).

“De nombreux gérants continuent de se lasser des innombrables restructurations bancaires ainsi que du manque de vue à long terme de leur employeur et des limitations imposées dans leurs choix de gestion.”

Qu’est-il advenu aujourd’hui de cette prédiction? Force est de constater que si plusieurs établissements ont certes opéré un rapprochement ou procédé à une fusion ces dernières années, on réalise, dans l’ensemble, que le nombre de sociétés de gestion indépendantes actuellement en activité a nettement progressé. L’augmentation peut effectivement être quantifiée de l’ordre de 20% sur la seule période 2005-2010. La consolidation du secteur ne s’est donc clairement pas concrétisée à ce jour. Comment cela peut-il s’expliquer?

Par le fait, d’une part, que de nombreux gérants actifs au sein de banques continuent de se lasser des innombrables restructurations bancaires, du manque de vision à long terme de leur employeur, des limitations imposées dans leurs choix de gestion pour ne pas dire des mots d’ordre imposés en matière de sélection de produits. Corollaire de ce qui précède, il n’est plus possible aux yeux de multiples gestionnaires d’exercer leur métier et de s’occuper de leurs clients comme ils le souhaiteraient.

D’autre part, par l’absence de réelles barrières à l’entrée (exigences légales et organisationnelles peu élevées) qui facilite, comparativement à d’autres pays, l’exercice du métier de gérant de fortune indépendant (GFI) et explique le succès de ce modèle en Suisse.

Dans ce contexte, malgré les turbulences et les incertitudes régnant tant sur les marchés que sur les conditions-cadres, de nombreux gestionnaires continuent de nos jours à faire le choix de quitter leur employeur bancaire pour rejoindre le monde de la gestion indépendante, soit en intégrant une société de gestion établie soit, s’ils possèdent une bonne dose d’esprit entrepreneurial, en fondant leur propre structure de gestion dite externe.

Le gérant qui aura opté pour cette voie pourra alors tirer profit des deux atouts principaux inhérents au modèle de gestion indépendante. Premièrement, la capacité de servir un nombre restreint de clients choisis et de délivrer un service de qualité à ces derniers, tout en jouissant d’une grande autonomie d’action et en inscrivant celle-ci dans une optique de long terme.

Deuxièmement, la mise en oeuvre d’une gestion basée sur une véritable architecture ouverte, ceci par le biais de la large palette de services et prestations mis à disposition par les différentes banques dépositaires sélectionnées (recherche, recommandations d’investissement, produits, tarifs négociés) et leurs experts respectifs (ingénierie patrimoniale par exemple). Le gestionnaire aura ainsi la liberté d’assembler les compétences qui formeront les solutions sur-mesure aptes à délivrer la valeur ajoutée que tout client est en droit d’attendre.

Le concept d’organisation de la société de gestion indépendante est aujourd’hui bien établi puisqu’il peut être crédité d’une part de marché de l’ordre de 15-20% des avoirs gérés en Suisse.

Ce développement a été en partie rendu possible par l’appui fourni par de nombreuses banques dépositaires, lesquelles mettent depuis deux décennies à disposition des GFI, dans une authentique relation partenariale, une offre complète de prestations et services dédiés.

Dans les années à venir, les gérants indépendants seront appelés à relever plusieurs défis:

  • Trouver des relais de croissance hors d’Europe, le marché traditionnel d’une majorité de GFI. Même si le libre accès au grand marché européen vient un jour à être octroyé aux gérants externes suisses, le véritable potentiel de développement de clientèle se trouve avant tout en Asie centrale et orientale, en Amérique latine et dans les pays émergents. Se projeter dans ces régions du globe ne sera pas chose aisée pour les GFI de taille restreinte.
  • Gérer la baisse prévisible et parfois déjà effective de la profitabilité de l’activité GFI. C’est dans ce contexte que revient régulièrement la question de la taille critique. Cette dernière ne saurait en aucun cas se résumer à un chiffre unique (exprimé en termes d’AuM) applicable à l’ensemble de l’industrie tant il est vrai que de multiples facteurs (typologie des clients, mode de gestion, rentabilité globale, modèle d’organisation, niveau de charges, degré de sous-traitance opérationnelle) entrent en considération dans la détermination de la taille critique, laquelle sera donc, par définition, différente d’un GFI à l’autre.
  • Anticiper la problématique incontournable de la passation de clientèle à l’âge de la retraite, une étape trop souvent négligée ou mal planifiée dans bon nombre de petites structures. Sur les quelque 3000 sociétés de gestion actives en Suisse, on estime qu’un tiers d’entre elles, pour la plupart peu préparées, seront contraintes de devoir gérer le délicat processus de succession d’ici à l’horizon 2020.
  • S’adapter aux changements législatifs et réglementaires continus qui affectent les conditions-cadres de l’activité GFI.

“Le concept de société de gestion indépendante est aujourd’hui établi. Le secteur peut être crédité d’une part de marché de quelque 15 à 20% des avoirs gérés en Suisse.”

La difficulté, voire l’incapacité, de relever ces différents challenges conduira immanquablement un certain nombre de sociétés, particulièrement celles de taille modeste et celles ayant subi une baisse importante de leurs revenus depuis le début de la crise, à considérer des alliances. Ces rapprochements ne seront cependant pas forcément constitutifs d’une concentration massive du secteur.

En effet, seul un changement législatif majeur pourrait déclencher une véritable consolidation. La fixation, par exemple, d’un seuil minimal de capital social par entité ou l’interdiction du cumul sur une seule et même personne de fonctions différentes (dirigeant, gestionnaire, portfolio manager, déontologue, risk manager) signifieraient la disparition programmée des très petites structures et l’accélération de facto du processus de concentration.

Même si, du fait de l’attractivité du concept, sa part de marché a le potentiel de progresser jusqu’à représenter le quart des actifs gérés en Suisse, l’univers fragmenté des GFI est appelé à se consolider au niveau du nombre de ses intervenants. C’est ainsi que l’évolution des conditions-cadres, tant nationales qu’internationales, couplée à la pression persistante sur la rentabilité des opérations, vont à terme conduire à l’inéluctable redéfinition du paysage de la gestion indépendante helvétique.

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